jeudi 15 décembre 2011

Le blues de l’utilisateur facebook ou blues de l’hyperindividualisme

Avouez-le: devant les photos du dernier safari familial de votre collègue sur Facebook, après l'admiration, les oh! et les ah!, vous avez aussi ressenti - la honte - une petite pointe de jalousie. Et moi? Devant les clichés du nouveau-né d'une collègue, un pincement: et moi? Devant la promotion du beau-frère, un cri du coeur. Et moi, et moi, et moi? Le bonheur des autres serait-il la cause de notre malheur? Et Facebook l'instrument qui le fait croître ?
ne équipe de chercheurs américains, dont les résultats viennent d'être publiés dans le bulletin Personality and Social Psychology, en sont convaincus: le bonheur des autres, aussi virtuel soit-il, nous déprime.

C'est en observant le comportement de ses amis qui naviguaient sur Facebook que l'auteur principal de l'étude, Alexander H. Jordan, doctorant en psychologie à l'Université de Stanford, a eu l'idée d'enquêter sur la question. «Ils avaient l'impression de ne pas être comme les autres, parce qu'ils ne se sentaient pas entièrement satisfaits de leur carrière, de leurs relations interpersonnelles. Puis, quand je leur demandais pourquoi ils se sentaient ainsi différents, ils faisaient souvent référence à ce qu'ils voyaient sur Facebook, les photos de bonheur à la chaîne, les récits d'aventures palpitantes, tant de leurs amis lointains que de leurs proches», explique l'auteur.
"La télé réalité Facebook"
Facebook peut nous faire beaucoup de bien. C'est un outil qui nous permet de rester en contact avec des amis, de la famille. Mais ce qui est dangereux, c'est de considérer tout ce qu'on voit sur Facebook comme la vérité absolue. Il faut s'ouvrir les yeux et prendre conscience que l'environnement Facebook est édité, retouché, probablement autant que n'importe quelle soi-disant émission de téléréalité. elon elle, l'immensité des informations publiées sur Facebook est sans doute aussi source d'impuissance, de découragement, bref, de tristesse: «On se sent dépassés face à tout ce qu'on manque, incapables de faire des choix, dit-elle. Comme si tout ce qu'on manque devient plus important que ce qu'on a.»
« L’Hyperindividualité»
D'après le sociologue et professeur à l'École des médias de l'UQAM André Mondoux, ce blues de l'usager Facebook n'est d'ailleurs qu'un symptôme d'un blues très actuel: le blues de l'«hyperindividualiste»: «Nous sommes dans une société où prédomine l'hyperindividualité. Le «je» est prépondérant, dit-il. Et Facebook, c'est ça: une stratégie de quête identitaire et d'autoexpression. Dans une logique de marketing, de branding personnel. Mais chassez le naturel et il revient au galop. Nous sommes des êtres sociaux. Et nous avons besoin de l'autre pour nous définir. Je me demande si ce n'est pas là qu'est toute la charge émotive.» Car même si nous nous croyons hyperémancipés, capables de nous définir tout seuls, «il faut s'assumer. Et c'est moins évident». Qu'on se le dise: une tape sur l'épaule, ce sera toujours plus stimulant, réconfortant, bref, apprécié, qu'un simple «J'aime» virtuel.



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