jeudi 15 décembre 2011

Andreù Solé et la conception du bonheur



Revenons sur cette notion de monde. Qu’est ce qu’un monde ?

Pour Andreù Solé, un monde est une conception du bonheur.
Chaque nouveau monde est une réinvention du bonheur.
Appelons bonheur la meilleure manière de vivre, vivre dans son acception la plus large : parler, manger, s’habiller, saluer, faire l’amour, croire, rever, etc.


Le bonheur relève ainsi d’une conception totalement arbitraire de la bonne manière de vivre et l’histoire humaine d’une succession sans fin de créations et de disparitions de mondes (babylonien, grec, romain, aztèque, soviétique, etc.).

Dans l’Entreprise-Monde, le bonheur, c’est satisfaire ses besoins. Et pour satisfaire nos besoins, nous travaillons. Nous travaillons pour gagner l’argent qui nous permettra d’acheter les biens et services qui satisferont nos besoins.
 La bonne manière, croyons-nous, celle qui garantit l’efficacité, consiste à s’organiser selon un schéma hiérarchique avec des dirigeants et des dirigés (remarquons que le “dirigeant d’entreprise” est dirigé par les propriétaires de l’entreprise). En outre, nous cherchons la nouveauté car nous croyons que ce qui est nouveau est supérieur. Nos besoins étant évolutifs et illimités, nous avons toujours de nouveaux besoins, et comme un besoin est un manque, finalement nous sommes constamment frustrés. Un petit air de Schopenhauer, n’est ce pas ?

Être frustré, voici le bonheur de notre monde.

La conclusion parait révoltante, mais n’est-ce pas pourtant ce que l’on observe autour de nous et en nous ? N’avez-vous pas envie d’une voiture, d’un grand écran, d’un e-reader, d’un ampli, d’une piscine, d’une maison. Et si vous du côté des plus nantis, ne désirez-vous pas quelque chose de mieux, de plus grand, de plus puissant, de meilleure qualité, de plus beau ?


Et pour nous rappeler que l’Homme n’est pas a fortiori un être de besoin, il nous faut considérer d’autres façons de vivre :
Nous sommes un peuple heureux. Nous avons tout ce qu’il nous faut : de la nourriture, nous avons suffisamment d’eau, nous avons aussi de l’amour et la liberté [...]. Ma vie me plaît. Je suis fier d’être Bushman, je suis heureux de faire parti de cette famille et de ce peuple [...]. Mais, bien sûr, oui j’ai peur qu’un jour les Blancs, les gens qui travaillent viennent et prennent nos terres.”
(extrait de la réponse d’un Bushman dans A la sueur de ton front, réalisé par José Maldavsky et Frédéric Tonolli).

Il existe une relation fondamentale entre le bonheur de ce monde et l’entreprise. C’est elle qui crée constamment de nouveaux besoins, par du marketing toujours plus efficace et précis.
 L’entreprise est une machine à insatisfaire, elle produit la frustration qui porte notre monde. La plupart des habitants de ce monde travaillent dans des entreprises afin de toucher un salaire qui leur permet d’acheter des marchandises à des entreprises, pour satisfaire leurs besoins. 
On dit que l’entreprise est une communauté. Elle apparaît plutôt comme une fragile association d’individus; c’est une organisation qui stimule l’individualisme. L’entreprise met en concurrence les humains.

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